Une Vie Compliquée - Chapitre 20

Dans la voiture, Marc semblait un peu loin de la réalité, perdu dans ses pensées. Tellement il était crispé sur le volant même s’il lançait à Elsa de temps à autre un regard et un sourire discrets. Le trajet fut très court. En temps normal, Elsa aurait mis trois fois plus de temps si elle devait sortir chercher un moyen de déplacement à ce moment de la journée pour s’y rendre. C’était un restaurant italien. Donc spécialité pizza. Dès qu’ils furent installés, ils furent servis en même temps. Marc fut le premier à se lancer dans le bain.

Excuse-moi si je n’ai pas apporté la pizza comme promis
Ce n’est pas grave. Le cadre ici est très joli.
Heureux que tu apprécies. J’avais peur qu’elle refroidisse le temps du trajet. Tu sais comme on le dit, c’est plus intéressant quand c’est chaud.
Je confirme. Alors dis-moi, que me vaut l’honneur d’une invitation ce midi ?
J’avais besoin de parler avec une amie.
Il y a un souci ?
Le stress du boulot ces derniers temps. Et aussi les soucis de la vie.
Tu as des soucis toi ? On ne dirait pas. Alors comment puis-je t’aider ?
Tu m’aides déjà pour avoir accepté passer ce petit moment avec moi.
Tu me flattes.
Pas du tout.
Alors mes honoraires te coûteront plus qu’une simple pizza.
Je te fais un chèque en blanc si tu veux. Ajoute autant de zéro que tu peux.
Alors c’est si grave que cela ce qui t’arrive ?
Non, la routine en fait. Je voulais changer un peu.
Ou bien c’est sentimental ?
Même si on veut, c’est un élément difficile à esquiver dans la vie.
Donc ta fiancée te fait des caprices ?
Fiancée ? Qui t’a dit que j’ai une fiancée ?
J’avais vu une photo sur ton bureau la dernière fois. Je suppose que c’est elle car elle n’avait pas l’âge d’être ta mère.
Ah ! Tu veux parler de Sylvie ?
Elle a un joli prénom.
C’est ma petite sœur.
Ah ! d’ailleurs parle-moi un peu de toi.
Ce n’est pas le sujet.
Je pensais que tu avais besoin que je te rende un service en passant du temps avec toi. Et tu ne peux même pas me parler de toi ?
Excuse-moi. Ce n’est pas ce que je voulais dire. En fait, c’est la première fois qu’une fille me pose cette question.
Waouh. T’a jamais eu de copines ?
Si. Mais elles s’intéressaient juste à ce que je possédais. Donc je n’y pense plus trop. Je préfère me concentrer sur le boulot. Tu vois non ?
On dit c’est vous les hommes et vous dites que c’est plutôt les femmes. Le monde comme il va.
Paradoxal ou bien ?
Alors parle-moi de toi.
Je m’appelle Marc. Je suis médecin. J’ai vingt-huit ans. J’ai une petite sœur âgée de moins de cinq ans. J’habite toujours pour le moment avec ma mère car la maison est trop grande pour elle seule. En plus je ne suis pas encore engagé donc…
Donc un cœur libre.
En quelque sorte.
Et c’est quoi ton genre de fille ?
Je n’ai pas de préférence. Cependant, je souhaite qu’elle ait bon cœur. Le reste n’a pas trop d’importance.
Différence d’âge maximum avec une fille ?
Euh. Je dirai un maximum de dix ans.
Donc je suis une cible potentielle à ce que je vois. Je te plais ?
Oui. Euh non. Ce n’est pas ce que tu crois.
Alors c’est oui ou c’est non ?
Je ne sais pas trop. Je veux en fait mieux te connaître si tu le veux bien. J’avoue que tu m’intrigues beaucoup. C’est pour cela que j’avais besoin de discuter avec toi.
Je t’intrigue comment ?
La dernière fois qu’on s’est vus remonte à presque trois semaines déjà et nous avons à peine échangé une dizaine de messages.
En fait je ne voulais pas en rajouter à ton planning déjà chargé.
Ah oui je vois.
Dis-moi, c’est tout ce qui t’intrigue chez moi ?
Permets-moi de mieux te connaître.
Tu n’as pas peur que je m’intéresse à toi à cause de ton argent ?
Je sais que tu es différente des autres. Sinon tu l’aurais déjà démontré.
Hum. Qu’est-ce qui te fait croire cela ?
Mon intuition. Fin de séance aujourd’hui. Je te raccompagne au bureau avant qu’il ne soit trop tard.

C’est à ce moment précis qu’Elsa se rendit compte qu’ils avaient passé le temps à parler de long en large sans prendre la peine de croquer dans la pizza qui était posée sur leur table.

Eh merde, nous n’avons même pas mangé nos pizzas.
Ah oui. T’avoir en face de moi était suffisant pour me rassasier.

Que voulait dire Marc par-là ? N’était-il pas entrain de la draguer comme cela ? Elle qui avait tant attendu qu’il fasse ce pas. Mais un sentiment mitigé s’installait en elle. Ou bien s’emballait-elle trop à force de regarder des films d’amour à la télévision ? Marc était devant elle mais elle semblait regarder au travers de ce bel homme. Un long silence s’était imposé. Puis revenant à elle, elle demanda au serveur de lui emballer son plat. Marc demanda qu’on fasse de même pour lui. Il régla la note en ajoutant un pourboire de cinq mille francs au serveur qui se confondit en un salamalec de remerciements et de bénédictions pour lui et pour leur couple. Elle n’en croyait pas ses oreilles. Donc les gens les considéraient déjà comme un couple ? Cette pensée fit apparaître un sourire sur son visage qui s’était tendu quelques minutes plus tôt.

Un récit de Martial Daté TEVI-BENISSAN

à suivre...