18 Avril 2020
Un récit de Martial Daté TEVI-BENISSAN
Elisabeth et sa maman la raccompagnèrent jusqu’à la station de taxi située à moins de cinq minutes de marche de leur appartement. La pluie avait cessé depuis. Ce n’était même pas une vraie pluie. Elle avait duré en tout une dizaine de minutes et s’est calmée. Sur le chemin du retour, l’euphorie avait laissé de la place à un silence total. Main dans la main, elles marchaient comme deux copines du campus. Soudain, Elisabeth demanda à sa maman de ne pas rentrer directement mais de faire une petite balade pour profiter de la fraîcheur. Sa mère s’exécuta sans broncher. Il faut dire qu’elle-même en avait besoin. Sa fille est désormais majeure et doit se prendre en charge pour certaines décisions. Elle avait toujours redouté ce moment. Mais pouvait-elle quelque chose ?
Elles s’arrêtèrent devant les vitrines d’une boutique qui vendait des robes de soirée essentiellement et des lingeries pour femmes. A l’heure-là, tout était déjà fermé mais elles pouvaient admirer les créations portées par les mannequins. A tour de rôle, elles imitaient les mannequins en défilant devant les vitrines éclairées. Puis elles s’offrirent une glace avant de rentrer définitivement à la maison.
Chacune regagna sa chambre. Le sommeil viendrait bercer Elisabeth avec la journée chargée d’émotions qu’elle venait de passer. De toute manière, elle avait déjà décidé. Ce n’est pas parce qu’elle voulait la sauce qu’elle retournerait la marmite chaude sur la tête comme l’insinue un proverbe sénégalais. Elle était persuadée en s’endormant que demain serait un jour nouveau, un meilleur jour avec de meilleures perspectives. Après tout, sa maman allait l’aider à obtenir un stage et c’était une très bonne nouvelle. Au diable ce directeur d’Atlantis. Elle s’en sortira sans se rabaisser et quand elle aura les moyens et l’occasion, elle s’en prendrait à lui. Elle ne pouvait pas imaginer le nombre de jeunes filles auxquelles il a fait un chantage pareil et qui par manque de soutien se sont laissées faire. Plus elle en pensait, plus elle ressentait du dégoût pour lui. Pourquoi l’homme devrait-il se montrer cruel ? Avec tout ce qu’il y a comme filles de joie dehors, il n’a rien trouvé qu’une étudiante qui vient pour travailler et obtenir son diplôme. D’ailleurs avait-il une fille ? Si oui, quelle serait sa réaction si sa fille revenait lui dire qu’on lui a fait cette proposition indécente pour lui offrir un stage ? Elle ne le saura pas. Pour le moment, vu que le destin séparait déjà leur chemin elle préférait positiver en pensant à ce jeune homme du parc. Il devait être médecin si elle repense à la conversation qu’il avait faite au téléphone. Il devait être intelligent aussi car être médecin à son âge suppose un garçon intelligent. Mais zut ! Parlant de son âge, qu’est-ce qu’elle en savait ? D’ailleurs si elle considère qu’il a eu le baccalauréat comme elle, en plus de faire au moins sept ans d’étude et un an de stage, il devait avoir au moins sept à huit de plus que lui. Même si l’écart d’âge semble grand, elle ne pense pas que cela poserait de soucis. C’est vrai qu’elle s’est toujours fixée une marge de cinq ans mais une règle est faite pour être enfreindre par moments. Elle s’imaginait se serrer contre lui, et lui, avec sa main, caressait son corps. Ce devait être très bon vu qu’elle en eut la chair de poule. Il faut qu’elle le revoie. Elle n’avait pas son adresse, ni son nom de famille mais s’est mise déjà à faire des recherches sur Facebook et Instagram. Mais rien. On dirait un fantôme. Il y avait plusieurs Marc mais aucun ne lui ressemblait. Même quand elle ajoutait le mot Docteur, elle n’obtenait rien. Elle était encore en train de réfléchir quand le réveil de son téléphone sonna. Elle ne s’était même pas rendu compte qu’elle s’était endormie avec le téléphone dans ses mains.
à suivre...