23 Avril 2020
Le cœur de Diane battait un peu plus vite. Qu’est-ce que sa fille pouvait bien lui demander si matinalement ? En plus la façon lui faisait peur. Elle n’avait pas l’habitude de poser ce genre de questions quand elle avait quelque chose à demander. Serait-ce en rapport avec son passé qu’elle voulait tenir loin d’elle ? Elle espérait que non et devait se montrer rassurante. Se ressaisissant, elle dit :
Prenant un grand bol d’air comme une athlète sur le point de commencer un sprint, elle ouvrit la bouche avec un son peu audible :
Sa mère interloquée resta bouche bée. Elle s’attendait à tout sauf à cette question. Et puis comment de nos jours répondre à une fille très intelligente déjà sans paraître ridicule ? Peut-être que Google aurait la réponse. Mais si Sa fille lui avait posé la question, c’était sûrement pour avoir une réponse rassurante. Le moment était crucial. Une opportunité de se rapprocher de sa fille par ce moment trouble et délicat de la vie d’adolescente.
Sa maman descendit dans la cuisine, toute pensante. Cette question réveilla en elle tellement de souvenirs. Elle se rendit compte qu’elle n’avait plus jamais pensé à cette chose. Toute son attention était focalisée sur Elsa. Des larmes silencieuses coulaient quand sa fille descendit dans la cuisine. Elle a été drôlement rapide aujourd’hui. C’était comme si on l’avait chassée de la douche. Elle posa un baiser rapide sur la joue de sa mère avant de prendre place en face, les yeux écarquillés comme ceux d’une gamine à qui on racontait un conte de fées.
Puis elle se lança dans une explication assez longue pour capter toute l’attention de sa fille. Elle parlait des regards furtifs quand vous êtes dans le même espace avec d’autres personnes, la honte de parfois trop fixer l’autre, le fait de penser tout le temps à la personne, de rêver d’elle, de faire tous ses projets en pensant d’abord à l’autre, l’envie de faire des cadeaux, des compliments, de se voir tout le temps, le cœur qui bat un peu plus vite, la jalousie quand on voyait l’autre en compagnie d’une autre personne.
Bref, c’était un peu comme dans les chansons. On a l’impression de devenir fou, de n’exister que pour l’autre, de se fâcher aussi très rapidement mais de pardonner aussitôt car on ne veut pas perdre l’autre. On est attentif aux petits mots romantiques. On voit la vie en rose en fait. On devient parfois têtue surtout quand on est convaincu de vivre un truc réel. Mais parfois, beaucoup de ces signes ne sont que la résultante d’une attirance physique. Si cela dure avec le temps, alors on peut considérer que tout vire du coup de foudre à un truc pour réel. Mais pour faire plus court, la première étape est un coup de foudre. Donc c’est passager et basé sur des attirances portant sur le physique, les gestes simples, et surtout la représentation que l’on se fait du prince charmant. C’était assez intéressant et complexe la définition d’un tel concept que les questions ne cessaient de pleuvoir sur sa tête. Jusqu’à la question qu’elle redoutait le plus :
Elle regarda en silence sa fille pendant environ cinq minutes, cinq minutes qui paraissaient une éternité. Tellement beaucoup d’émotions la submergeaient. Elle avait même du mal à soutenir le regard de sa fille quand elle s’essuya une larme qui coulait le long de sa joue avec le revers de sa main.
Elles s’installèrent dans le canapé en face de la télévision dont le son était muet et sa maman s’élança dans un récit qui allait bouleverser sa vie. Mais avant de commencer, elle mit un point d’honneur à rappeler à Elsa une chose très importante.
Diane prit encore une profonde inspiration et poussa une sorte de soupir puis se lança.
Un récit de Martial Daté TEVI-BENISSAN
à suivre...